Claire Elie, enseignante en copie à l’école La fontaine, propose à ses élèves depuis le 1er janvier 2017 de participer à la réalisation d’un projet ambitieux, la copie du tableau de Winterhalter : « L’impératrice Eugénie entourée de ses dames d’honneur »
L’idée
L’idée de faire une copie collective a germé au printemps 2016. Le copiste travaille souvent seul à son tableau avec sa manière de faire et ses techniques ; aussi ce type d’exercice n’est pas fréquent et je n’en connais pas d’exemples. Ce projet est réalisé avec la collaboration des élèves de l’atelier de copie de l’Ecole Lafontaine. Le tableau est accroché dans l’atelier. Il ne faut pas oublier que beaucoup de peintres peignaient traditionnellement en atelier avec l’aide de leurs élèves.
Le choix de l’œuvre
Le choix de l’œuvre a été guidé selon plusieurs principes.
Un caractère régional :
Il fallait une œuvre faisant écho au territoire géographique où nous nous trouvons. En Allier, la période du Second Empire est une période de développement économique sans précédent. De grandes figures du régime y sont implantées comme Fould, Morny mais surtout l’empereur qui se rend régulièrement à Vichy et qui est accompagné de son épouse Eugénie qu’on voit dans le tableau entourée de ses dames d’honneur.
Le peintre :
C’est également la découverte d’un peintre de talent, Winterhalter, un peu mit de côté en raison de la mode des impressionnistes et de sa claire appartenance au régime puisqu’il est portraitiste de la cours… mais il est également le grand portraitiste de toutes les cours européennes de l’époque. Alors qu’on redécouvre Vigée Lebrun, Winterhalter est son pendant masculin à peine un siècle plus tard. Il a su comme nul autre traduire le ton romantique de son époque en réalisant de magnifiques portraits de l’élite européenne : la reine Victoria, l’impératrice D’Autriche Hongrie, la tzarine…il est inégalable pour ses portraits de femmes, flatteurs, vaporeux, mettant à chaque fois subtilement en valeur la beauté de ses clientes.
Techniquement on ne peut que remarquer la perfection formelle du dessin, des zones aux modelés très travaillés (visages, épaules), le sens des détails (bijoux, accessoires du vêtement), l’éclat des soieries contrastant avec des zones plus négligées souvent en arrière- plan qui donnent un effet réaliste et presque photographique.
La peinture
C’est en dernier le plaisir de se lancer sur un tableau de grand format, romantique et « glamour », à la palette riche de ravissantes couleurs comme celles des robes à crinolines aux textures précieuses comme la soie, le taffetas, le tulle, la dentelle. Ces dames ont des visages raffinés et parfois mélancoliques. Ce tableau d’apparat, orchestré et « factice » montre à l’époque ces demoiselles sous leurs meilleurs jours, à la dernier mode parisienne avec ces robes de bal dans un décor champêtre irréaliste. Transparaissent leurs idéaux romantiques et la volonté de faste du régime qui souhaite se rattacher aux exemples du passé notamment ici Vigée Lebrun et à la cour de Marie-Antoinette qu’Eugénie admirait.
Mise en œuvre technique du tableau
Techniquement, il a fallu réduire le tableau de moitié de son format, ce qui est déjà grand. En effet , les espaces ne permettaient pas d’accueillir le format d’origine. Le châssis a été réalisé sur mesure par un ébéniste hollandais, Evert Pardekooper. La toile est une toile de lin datant de l’époque du Second Empire. Elle a été clouée puis encollée à la colle de peau de lapin et enfin apprêtée à l’ancienne avec cette colle et du blanc de Meudon. Le report a été utilisé avec la technique du carroyage, technique ancienne.
*On a cependant pas oublié notre époque et l’utilisation des nouvelles technologies. Cette technique du carroyage a été facilitée par un prototype : un logiciel de carroyage conçu par l’ingénieur Claude Brunet. Il n’est pas encore commercialisé.
Une fois le dessin préparatoire réalisé, les carreaux ont été gommé et le fonds commencé. On a utilisé de l’essence de térébenthine, ce qui est cohérent avec l’époque.